Je dois avouer que je n’avais pas vu venir la vague d’indignation face à
l’attaque transphobe sur Julia. Les médias en ont parlé mieux et plus
qu’à l’habitude. Mes potes hétéros cis ont été chamboulé·es. Même les
“adultes” que je connais ont eu besoin d’en parler. Deux discussions
avec ces sexagénaires cis hétéros m’ont particulièrement marquée.
La première était avec une personne plutôt du genre à se moquer des
justicier·es social·es. Il était choqué par la violence de l’attaque
(positif) mais avait genré Julia au masculin (…). Il ne comprenait pas
bien, s’était-il justifié. Comment aurait-il pu ? Il ne connaît pas de
personnes trans out et ne sait rien de leurs vies. Manque de curiosité
de sa part ? Très clairement. Mais aussi manque de représentation trans à l’écran.
La seconde était avec une alliée sans faille. Elle n’arrivait pas à
accepter qu’on en était encore là, que le danger était encore si présent
pour les personnes trans. Elle était d’autant plus émue qu’un ami de
son fils est en train de transitionner. Elle a peur pour lui. A chaque fois, qu’elle entend parler de personnes trans, c’est dans le contexte de violences. Elle m’a parlé du film Girl, de Lukas Dhont, qui raconte la transition d’une danseuse et qu’elle avait trouvé très beau. Quand je lui ai expliqué pourquoi
une partie de la communauté trans n’avait pas aimé le film, elle a tout
de suite compris. C’est assez facile de comprendre que ce film ait pu
être vécu comme voyeuriste, irrespecteux du corps trans, démesurément
violent, dangereux même, quand on fait preuve de bonne volonté. Elle
aurait bien aimé entendre ce son de cloche lors de la sortie du film.
Mais la presse est ce qu’elle est… Je lui ai rappelé que toutes les transitions ne sont pas des histoires d’horreur, que la vie des personnes trans ne se résume pas à leur transition et qu’il est possible d’être trans et épanoui·es.
Comment savoir que les trans vivent de belles vies heureuses si on ne voit jamais leurs histoires ? A
force de ne voir que des adolescentes qui s’auto-mutilent et des femmes
qui se font agresser en prenant le métro, on finit par penser que c’est
la seule réalité. Heureusement, les histoires changent.
Contre toute attente, je vais encore vous parler de la série Les Nouvelles Aventures de Sabrina puisque Netflix a mis en ligne la deuxième partie de la saison 1. Sabrina s’impose définitivement comme la série n’imp du moment, une série qui n’a d’égale que Riverdale
dans son ni-queue-ni-tête-isme. Et pourtant, je n’arrive pas à arrêter
de la regarder surtout maintenant que la série aborde frontalement
l’identité de genre de Suzie, l’amie de Sabrina joué·e par l’acteurice
non-binaire Lachlan Watson (un casting qui a eu un impact positif sur l’écriture du rapport au genre de Suzie).
[Spoiler] Dès le premier épisode de cette seconde partie, Suzie devient
Theo. Son coming-out se fait de façon très naturelle et est accueilli
avec bienveillance. Dans une série aussi peu subtile que Sabrina, cette
finesse est particulièrement appréciable (même si tout n’est pas parfait).
[Fin de spolier] Ce genre de représentation dans une série si grand
public me ravit. Les jeunes ne pourront plus dire qu’ils ne savaient
pas, qu’ils ne comprenaient pas.
Mais il faut aussi dépasser les histoires de coming-outs et sur ce point, The Fosters
excelle. J’ai enfin regardé cette série inédite en France sur un couple
de lesbiennes et leurs enfants biologiques et adopté·es, et j’ai été
agréablement surprise de voir non pas un mais deux personnages trans.

Le premier, Cole, joué par l’acteur trans Tom Phelan,
fait son entrée dans la série avant la prise en charge médicale de sa
transition dans un contexte de rejet familial. On le voit finir sa
transition et s’épanouir. On le voit torse-nu à la plage, on le voit
organiser un bal de promo queer, on le sait heureux en couple.
Le second arrive plus tard dans la série. Il s’agit d’Aaron, un ami de
Callie, la fille ainée de la famille, joué par l’acteur trans Eliott
Fletcher (en gif au dessus). Bien évidemment vu que le mec est sexy et
fait de la moto, on arrive vite à un classique « will they, won’t they ».
Spoiler : they will. La série ne fait pas dans le sensationnalisme,
elle ne s’attarde pas sur sa vie antérieure et sa transition, et ne met
pas en scène de la transphobie. Aaron vit une vie tout ce qu’il y a de
plus normale. On le voit en rencard avec Callie, au lit avec Callie,
aux repas familiaux de Callie. Bref, on le voit être. La série ne nie
pas pour autant sa transidentité. Lors d’un épisode, on le voit tenter
de faire la paix avec sa famille, lors d’un autre, on voit Callie se
demander si coucher avec un homme trans sera différent d’avec un homme
cis. C’est spécifique mais n’importe qui se reconnaîtra dans ses défis.
Toutes ces séries marquent une nouvelle ère dans la représentation des trans,
une ère qui s’illustre par la mise en scène du quotidien des personnes
transgenres avec réalisme et bienveillance, une ère qui voit des acteurs
et actrices trans jouer des personnages trans. Même la France semble
entrer dans la modernité. La série Vernon Subutex, que je n’ai toujours pas pu voir, met en effet en scène plusieurs beaux rôles trans joués par des acteurices trans (Inès Rau dans le rôle de Marcia et Eloi Ferry dans le rôle de Daniel) !
Autre bonne nouvelle : Pose, la série sur un groupe de gays et
trans appartenant à une « house » au coeur de la Ball Culture, reviendra
le 6 juin sur FX ! Je vous promets de vous en parler constamment.
Sortez le pop-corn ? |
? The Fosters, Freeform
Et ce qui devait arriver arriva. A force de me pâmer devant Good Trouble, j’ai fini par regarder The Fosters. Cette série inédite en France suit la vie de Stef et Lena et de leurs cinq ados, biologique, adopté·es et accueilli·es. Si vous aimez les family dramas avec des ados qui font des conneries, des parents débordé·es, des jeunes qui enchaînent les relations amoureuses à 15 ans (alors que vous, vous étiez toujours célibataire à 19 ans), des accidents de voiture et des parents biologiques qui font soudain leur apparition, vous allez adorer The Fosters.
Sous couvert de drama familal, The Fosters abordent des sujets importants : le sort des enfants placés, l’addiction, l’immigration et l’amour de soi quand on est LGBT+. Evidemment, l’arc LGBT+ principal est le couple de Stef et Lena. Quel plaisir de voir un couple de lesbiennes vivre leur vie, faire des petites blagues coquines, rire avec leurs enfants. Mais c’est loin d’être le seul arc LGBT+. Un de leurs fils, Jude, un garçon de 11 ans, découvre qu’il est gay, sort avec son meilleur ami et apprend à accepter de porter une étiquette (dans cet ordre). A travers Jude et ses différents petits copains (le mec a du succès), The Fosters montre qu’il y a plein de façons de vivre son orientation sexuelle quand on est adolescent. Réaliste et émouvant. La série va même se pencher sur le manque d’éducation sexuelle pour les jeunes LGBT+ et y dédier un épisode. WOW. Il y a aussi deux personnages trans dont le personnage d’Aaron, le petit copain de Callie, dont je vous parlais dans l’édito. Yes ! L’épisode sur le bal de promo queer est tout simplement magnifique.
Je crois que je n’avais jamais vu de série aborder en profondeur et finesse tant de sujets propres aux personnes LGBT+. Il faut dire que la série a eu le temps avec ses 5 saisons d’une vingtaine d’épisodes. La série a pris fin l’été dernier.
L’actu paillettes ✨ |
Dans l’adaptation en live-motion du Roi Lion (adaptation que je refuse de regarder), Scar ne ressemble plus à un mec gay et noir. On applaudit. [Out]
Si vous aimez le gaming, vous allez adorer cette nouvelle série YouTube de Feminist Frequency sur les “queer tropes” dans les jeux vidéos. [YouTube]
Cathy Verney, la scénariste et réalisatrice de Vernon Subutex a beaucoup parlé des coulisses de la série et c’est fascinant. Voici un épisode de podcast et un article. [Un épisode et j’arrête / Komitid]
Le prochain spectacle d’Hannah Gadsby s’appellera Douglas, comme son chien. [Vulture]
Alerte série gouine ! HBO et BBC vont sortir le 22 avril, la série historique Gentleman Jack sur l’héroïne lesbienne Anne Lister. OULALA. [Jeanne Magazine]
Autre bande-annonce qui me réjouit, celle de Tales of the City, l’adaptation des Chroniques de San Francisco ! QUEER AS FUCK! [Vanity Fair FR]
Séries toujours. Ryan Murphy chéri strikes again. Il va adapter Prom en série. Rappelez-vous, c’est la comédie musicale sur une ado qui veut aller à son bal de promo avec sa copine. [Out]
Disney de son côté a annoncé travailler sur une série adaptée de Love, Simon. Je dis oui. [Hollywood Reporter]
Ohmygod. On a les premières images du nouveau Charlie’s Angels avec queen KStew (et Noah Centineo- say whaaaat). [Entertainment Weekly]
Le quart d’heure musical ? |
J’ai adoré cet article de Teen Vogue sur la nouvelle génération d’artistes noirs out et ai décidé de vous faire une sélection spéciale queer black men. Vous y retrouverez notamment une toute nouvelle chanson de Kevin Abstract dans laquelle on apprend qu’il est un power bottom. A retrouver sur Spotify et Deezer.
Sur ce, je vous souhaite une semaine complètement fierce and proud les bichons et bichonnes !
Aline
