Vendredi marquait les cinquante ans des émeutes de Stonewall. Cinq jours de protestations qui ont donné naissance au mouvement de libération des LGBTQ+. C’est grâce au travail de ces activistes du passé, ainsi qu’à toutes celles et ceux qui les ont suivi, que nous sommes si libres aujourd’hui.
Dans de nombreux pays, nous sommes protégé·es légalement de l’homophobie, nous avons le droit de nous marier et d’avoir des enfants, nous pouvons changer de genre suite à une transition, etc. Bien sûr, la lutte est loin d’être finie, notre égalité est toute relative (PMA pour toutes bonjour), nous sommes toujours agressé·es dans la rue, l’homophobie force encore une trop grande partie d’entre nous à vivre caché·es au travail, la binarité de notre société met en danger les personnes trans et intersexes, et j’en passe, mais des batailles ont été remportées et il faut les honorer. Oui, j’ai l’optimisme facile en ce lendemain de Pride parisienne !
Voici donc une sélection de documentaires, films et séries qui rendent hommage à ces personnes qui ont tant donné pour que nos vies soient plus agréables. Mettez en route le ventilo, sortez les bâtonnets de glace, préparez vos mouchoirs, l’heure du binge-watching est arrivée !

Au détour d’un épisode flashback, Tales of the City (Les Chroniques de San Francisco en français) nous rappelle que les soulèvements contre les abus policiers LGBTphobes n’ont pas commencé avec Stonewall. La série rend hommage au soulèvement du Compton’s Cafeteria à San Francisco en 1966, mené, comme souvent, par des personnes trans. C’est sur Netflix.
Mais, c’est bien le ras-le-bol des habitué·es du Stonewall Inn qui a marqué le début de la mobilisation généralisée des LGBTQ+. Il faut voir le documentaire Marsha P. Johnson : histoire d’une légende pour bien comprendre ce qu’il s’est passé à New York en cet été 1969. La légende veut que Marsha P. Johnson, militante transgenre de la première heure, ait lancé la première brique, euh bouteille (c’est elle en gif au dessus). Une chose est certaine, elle, et sa camarade de lutte trans Sylvia Rivera, ont eu un rôle majeur dans l’organisation de la communauté après cette soirée. Ce documentaire, parfois un peu long, rappelle à la fois le rôle des trans et des drags queens dans l’obtention de nos droits et le coût de l’activisme. Marsha P. Johnson a été assassinée en 1992 et Sylvia Rivera a vécu longuement dans la rue. Merci à elles.
A la même époque, en France, ça bougeait aussi. Avec La Belle Saison, la réalisatrice lesbienne Catherine Corsini nous raconte une histoire d’amour entre deux femmes très différentes sur fond de militantisme féministe. On y découvre l’énergie du MLF, le mécontentement des militantes queers et leur fameuse interruption d’une émission de Ménie Grégoire dédiée au “douloureux problème” qu’était l’homosexualité. Beaucoup considèrent cette action comme l’évènement fondateur des luttes LGBT+ en France puisqu’elle a donné naissance par la suite au Front Homosexuel d’Action Révolutionnaire (FHAR) puis aux Gouines Rouges.

Dans les années 70, la priorité était de montrer au grand public que les LGBTQ+ existaient et qu’elles n’étaient pas des personnes perverses, dangereuses et vouées au malheur. L’enjeu était donc la visibilité. En ça, Armistead Maupin, l’auteur des Chroniques de San Francisco est un héros. Dans le documentaire The Untold Tales of Armistead Maupin, on découvre comment il a réussi à convaincre le journal grand public San Francisco Chronicles de le laisser écrire un feuilleton mettant en scène la diversité de la ville dans les années 70, ce qui incluait des personnages LGBTQ+ heureux, amoureux, tendres, sexuels ! On y découvre l’impact que ses écrits ont eu sur des générations de bébés LGBTQ+ et d’hétéros de tout bord. Il y explique aussi pourquoi il a outé Rock Hudson à une époque où les modèles LGBTQ+ manquaient. Un documentaire essentiel à voir sur Netflix.
A la même époque, le politicien et militant LGBTQ+ Harvey Milk transformait aussi l’opinion du grand public en devenant le premier élu ouvertement homosexuel dans une grande ville américaine. Le film Harvey Milk, réalisé par Gus Van Sant et écrit par Dustin Lance Black, tous deux gays, avait marqué le grand public lors de sa sortie il y a dix ans. A l’époque, les films retraçant notre histoire étaient encore plus rares qu’aujourd’hui. Cet excellent film avait obtenu 8 nominations aux Oscars.

Et puis, l’épidémie du SIDA est arrivée. Le téléfilm The Normal Heart de Ryan Murphy chéri revient sur la découverte de ce qu’on appelait à l’époque le « cancer gay » et comment la communauté s’était organisé pour affronter la maladie et alerter l’opinion publique. Je vous en avais parlé très longuement dans I like that. Dans le même registre, il y a évidemment 120 Battements Par Minute du réalisateur gay Robin Campillo qui retrace le début d’Act Up-Paris. Ais-je besoin d’expliquer pourquoi ce film est extraordinaire ? De toute façon, vous avez déjà vu ce film et vous avez chialé comme moi pendant et après le visionnage.
Je recommande aussi Philadelphia de Jonathan Demme. Ce film de 1993 raconte le combat d’un homme gay qui vivait tranquillement dans son placard jusqu’à ce que son entreprise le licencie après avoir découvert qu’il était atteint du sida. Il décide de les poursuivre pour licenciement abusif. Cette fiction est inspirée des combats menés par deux avocats licensiés injustement : Geoffrey Bowers et Clarence B. Cain. Si vous n’aviez pas encore suffisamment pleuré, vous voilà servi. Ce film est important car il montre un autre visage du militantisme. A côté des activistes fans de marches et d’actions chocs, il y a aussi les LGBTQ+ “assimilé·es” qui se battent contre les injustices qu’elles et ils rencontrent dans leur vie quotidienne et qui obtiennent, par leur combat personnel, des droits pour toute la communauté. Un film magnifique à mettre dans le contexte de son époque.
Pour comprendre pourquoi les militant·es queers aiment tant s’allier à d’autres groupes discriminés, je vous recommande Pride de Matthew Warchus, qui raconte comme des activistes queers ont apporté leur aide au mouvement minier dans l’Angleterre de Thatcher.
Enfin, la série Pose, de Ryan Murphy Chéri. Après une première saison qui prenait le temps de présenter le quotidien de plusieurs hommes gays et femmes trans noires et/ou latinx évoluant dans la communauté du “ballroom” des années 80, la seconde s’intéresse, notamment, à la façon dont cette communauté a réagit à l’épidémie du SIDA. Je vous en parlais plus longuement il y a deux semaines. Une série essentielle à voir sur MyCanal.
De quoi vous faire pleurer, danser et rire en même temps.
Sortez le pop-corn ? |
? Les Champs d’amours, à l’Hôtel de Ville de Paris
Saviez-vous qu’en plus de fêter les 50 ans de Stonewall, on fêtait aussi les 100 ans du cinéma LGBTQ+ ? Pour l’occasion, la mairie de Paris accueille cet été l’exposition gratuite « Champs d’amours » qui retrace la visibilité des LGBTQ+ dans le cinéma. Elle prend pour point de départ Autre que les autres : un film allemand datant de 1919 dont toutes les copies ont été détruites par les nazis. Une bande survivante, mais mutilée, a été retrouvée récemment et vous pourrez en voir un extrait. Le titre de l’exposition fait aussi référence à un film censuré à sa sortie, cette fois-ci en France : Un chant d’amour, réalisé en 1950 par l’écrivain homosexuel Jean Genet.
L’expo commence par un couloir aux couleurs de l’arc-en-ciel qui liste tous les films mettant en scène des personnages LGBT+ dans l’histoire. Vous allez avoir envie de prendre des notes ! La meilleure partie arrive ensuite. Le rez-de-chaussé accueille huit salles qui explorent des thèmes comme la censure, le gai Paris ou encore les festivals et qui diffusent des courts-métrages et des extraits de longs-métrages. C’est assez complet et pourtant, j’étais un peu déçue que les femmes n’y soient pas plus visibles et que l’expo ne discutent pas plus de la qualité de la représentation. Être visible, c’est bien, mais cela peut être néfaste si la façon dont nous sommes représenté·es renforcent ou créent des clichés dangereux, comme les bi manipulateur·rices, les lesbiennes machiavéliques et les gays obsedés par la chose.
L’actu paillettes ✨ |
Publier les dead names, c’est non ! Pourtant IMdB refuse de retirer les noms de naissance des personnes trans. [NYTimes]
Dans Variety, Brandon Flynn (13 Reasons Why) raconte comment les médias lui ont inventé un coming-out et s’interroge sur leur intérêt pour sa vie amoureuse. On notera que les autres acteurices de la série (toustes hétéros) ne provoquent pas un tel engouement. [Out]
Vous vous souvenez quand Carrie racontait dans Sex and the City que la bisexualité était « une escale sur le chemin de Gaytown » ? Les bis qui ont grandi dans les années 90 ne sont pas prêt·es d’oublier l’avalanche de clichés pourris à l’époque. [Variety]
Incroyable mais vrai, l’excellente série One Day at a Time a survécu à son annulation par Netflix. Merci à Pop, petite chaîne de câble LGBT-friendy, de l’avoir sauvée. [Konbini]
TELLEMENT HÂTE ! Ryan Murphy chéri vient de dévoiler le casting pour son film Netflix The Prom et c’est du très haut niveau. [Têtu]
La chaîne mexicaine Televisa a lancé sa première télenovela avec des personnages principaux gays. J’ai envie de sortir ma boite à mouchoirs et de binge-watcher la série. [Têtu]
Koh Lanta, c’est que du bonheur cette année. La semaine dernière, c’était Cyril qui roulait des pelles à son copain après de son élimination. Cette semaine, c’est Clo qui fait un coming-out tout mignon lors de la finale. [Têtu]
Alors là, on l’avait pas vu venir ! Queer as folk va avoir une version française. Et vu les personnes aux commandes, j’ai envie d’y croire. [Têtu]
L’avantage de faire revivre les classiques LGBTQ+ comme Tales of the City et Will & Grace, c’est que cela permet de faire se rencontrer plusieurs générations de personnes LGBTQ+. [Variety]
Le quart d’heure musical ? |
De la musique pour garder la bonne humeur de la Marche des Fiertés parisiennes. A retrouver sur Spotify et Deezer.
Wow, ce mois des fiertés aurait été intense. Vivement la tranquilité de l’été.
A la semaine prochaine !
Aline